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Les voies de l'étrange et du mystérieux
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  • Ce site se propose de rapporter des histoires mystérieuses et peu connues. Car bien souvent, le paranormal est là où on ne l'attend pas. Il évoque aussi certaines énigmes, en les abordant sous un angle inédit.
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Les voies de l'étrange et du mystérieux
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7 avril 2020

Akhenaton ou Moïse, lequel était vraiment inspiré ?

À 19 ans, Akhénaton entrevoit le futur Dieu d'amour

Si Aménophis IV avait été un pharaon comme les autres, tout cela n'aurait abouti qu'à une intensification du culte solaire à Thèbes. Mais le futur Akhanaton recelait en lui de plus vastes possibilités. Il était destiné à devenir, le premier dans l'Histoire du monde, l'homme qui aurait proclamé l'existence de Dieu, unique et invisible derrière toutes les choses multiples et visibles : d'un Dieu sans forme humaine, placé au-dessus de toutes formes, bon et compatissant, et seul dispensateur de la vie et du bonheur des êtres. Vers la sixième année de son règne, Akhénaton atteignit l'apogée de son évolution religieuse. À ce moment, au milieu d'un monde nullement préparé à le comprendre, un jeune homme de 19 ans sera devenu, par la seule élévation de sa pensée, un des grands précurseurs, un des grands maîtres de l'humanité.

Un siècle ou deux plus tard, Moïse, lui aussi, révélera le Dieu unique aux Hébreux. Toutefois, et au moins à l'origine, il s'agira d'un dieu anthropomorphe et sujet à des passions humaines, telles que colère et vengeance. Pour aboutir, en partant de là, à la conception franciscaine d'un Dieu d'amour révélé par ses créatures, il a fallu 25 ou 26 siècles d'évolution de la pensée religieuse, à travers une centaine de générations. Cette même évolution, s'accomplissant en 5 ou 6 ans dans l'esprit d'un seul homme, presque encore enfant au point d'arrivée, représente quelque chose d'extraordinaire. Le fait est unique dans l'Histoire; à tout prendre, inconcevable.

Une des premières entreprises du jeune Aménophis IV fut l'achèvement du temple dédié à Rê-Horachte-Aton à Karnak, dont son père, ou plus probablement sa mère, avait fait commencer la construction. C'est sur les rochers de la carrière d'où était tiré le matériel de cette construction que fut gravé pour la première fois un signe devenu par la suite le symbole de la religion d'Aton. Il s'agit d'un disque solaire, dont les rayons se terminent par des mains entourant le roi ou le couple royal. Ces mains sont évidemment les dispensatrices de la "chaleur qui est en Aton", vers laquelle s'orientait déjà la pensée religieuse du roi. La partie de Karnak dans laquelle le nouveau templs s'élevait fut nommée "Splendeur du Grand Aton"; bientôt, la ville de Thèbes reçut un nouveau nom : Ville de la splendeur d'Aton.

Pendant que le nouveau culte d'Aton avait commencé sous son égide à se développer, vers la sixième année de son règne, le roi, alors âgé de 19 ans, décida de répudier son propre nom, voulant ainsi abolir, dans ce nom même dont il avait hérité, l'hommage adressé au dieu de la religion officielle : car Amenhotep signifiait "Paix d'Amon", ou "satisfaction". Dès ce moment, le roi ne se nomma plus autrement que Akhnaton ou Akhénaton : Celui qui est satisfait en Aton, Celui qui trouve en Aton sa joie.

Akhénaton

Mais Akhénaton devait aller plus loin encore. Il interdit le culte d'Amon et fit fermer ses temples. Puis il ordonna d'effacer le nom d'Amon sur toutes les inscriptions. Il alla même jusqu'à faire radier le nom de son propre père sur tous les monuments érigés par Aménophis III. Le monothéisme ardent du jeune roi exigea la suppression pure et simple de tous les dieux d'Égypte, et le mot désignant les dieux disparut des monuments.

Akhénaton abandonne Thèbes et veut créer trois capitales universelles

Il est facile d'imaginer les remous que tout cela doit avoir causés dans un pays comme l'Égypte, où la vie publique relevait d'une tradition rigide et millénaire. Désirant symboliser l'universalité de la religion d'Aton, Akhénaton eut l'idée de créer trois nouvelles capitables religieuses : en Syrie, en Éthiopie, et surtout en Égypte même, à une certaine distance en aval de Thèbes. La construction en fut aussitôt commencée, et une ville splendide vit le jour. On se souviendra du nom de Rê-Horachte, le Soleil à l'horizon, dont le jeune roi était, d'après ses titres officiels, "grand prêtre" depuis son avènement. On retrouvera la même racine "akht" dans le nom de la nouvelle ville : Akhénaton, c'est -à-dire l'horizon d'Aton. Rien ne pourrait mieux symboliser l'évolution qui s'était entretemps accomplie dans l'esprit mûrissant du jeune homme : à la place dui dieu solaire de ses 13 ans, qui pourtant n'était déjà plus que le représentant, le porteur de la "chaleur qui est en Aton", c'est maintenant le véritable et unique dispensateur de cette chaleur, de cette vie de tous les êtres, Aton lui-même, qui est à l'honneur. C'est à celui-ci que vont désormais vouer un culte tout spirituel, dans des temples dépourvus de faste, les habitants de la splendide "Ville Horizon". Aton ne peut plus être représenté par une image; il est même interdit d'essayer de lui donner une figure. Ce n'est plus par les sens, mais par l'esprit que la créature peut se rapprocher de son créateur. Afin de marquer mieux encore le caractère tout spirituel de la nouvelle religion, c'est par l'expression "Seigneur d'Aton" que les monuments vont finalement désigner le nom de Dieu.

"Seigneur d'Aton", c'est-à-dire "Seigneur de la chaleur qui est en Aton" : cette expression prouve que le jeune roi s'était définitivement éloigné de tout ce qui pouvait encore apparaître comme une divinisation du soleil lui-même.

Une synthèse unique de la vie et de la religion

Une synthèse unique de la vie et de la religion, telle que pendant les 6 dernières années de son existence Akhénation la concevait, est unique dans l'histoire du monde. D'après cette conception, la vie est heureuse et belle, joyeuse et libre, non pas malgré la religion, mais à cause d'elle. Car l'esprit supérieur d'Akhénaton en avait banni la superstition et la crainte, et y avait introduit le soleil et le bonheur. Sa doctrine est d'un modernisme extrême. Il ne s'agit pas là de suppositions plus ou moins fondées : grâce à d'heureuses découvertes, nous savons ces choses de la façon la plus certaine. Nous connaissons le texte original de la doctrine d'Akhénaton, gravé de son vivant, et sous sa surveillance, sur les murs des tombeaux de ses contemporains.

Égypte gif

Car à la place des inscriptions traditionnelles et stéréotypées de la religion officielle, jusqu'alors en usage pour l'illustration des tombeaux des nobles Égyptiens, Akhenaton fit mettre les hymnes composés par lui en l'honneur de son Dieu. Ces hymnes, les archéologues les ont retrouvés. Ils sont brefs, pour la plupart; mais il y en a au moins un dont l'ampleur est celle d'un vaste poème religieux. Ces extraits, qui n'en représentent qu'une petite partie, doivent être lus sans oublier que, pour Akhénation, Aton ne s'identifiait pas avec le soleil, mais en était le créateur aussi bien que l'animateur :

Ton lever est beau à l'horizon du ciel

Ô vivant Aton, initiateur de la vie !

Lorsque tu apparais à l'horizon d'Orient

Tu remplis la terre de ta beauté;

Car tu es splendide, sublime, rayonnant;

Tes rayons enveloppent les terres;

Tu conquiers ce qu'elles donnent,

Tu les lies par les liens de ton amour.

Quoique tu sois loin, tes rayons sont sur la Terre,

Quoique tu sois très haut, tes pas sont le jour.

Quand tu te couches à l'hozrizon d'Occident,

La Terre devient sombre comme la mort.

Les hommes dorment dans leurs chambres,

Le lion sort de son antre,

Les serpents mordent, 

L'obscurité règne,

Le monde est silencieux.

Celui qui a créé tout cela repose dans son horizon.

Claire est la Terre quand tu parais à l'horizon,

Quand tu luis comme Aton du jour.

Les hommes s'éveillent et se mettent sur pied,

Leurs mains tendues adorent ton lever:

Puis la Terre entière se met au travail.

Le bétail se repose dans les herbages,

Tous les arbres, toutes les plantes croissent,

Les oiseaux volent de leurs nids,

Leurs ailes dressées pour t'adorer.

Les poissons des rivières sautent vers toi,

Et tes rayons plongent jusqu'au fond de la mer.

C'est toi qui places la semence dans l'homme,

Toi qui formes l'enfant dans la femme,

Toi qui le nourris par le sein de sa mère,

Toi qui le calmes pour qu'il ne pleure pas.

Quand le poussin est encore dans sa coquille d'oeuf,

Tu lui donnes le souffle pour le faire vivre,

Tu lui donnes la force pour percer la coquille;

Il sort alors de l'oeuf

Pour pépier de toutes ses forces;

Il court partout sur ses deux pattes

Dès qu'il est sorti.

Innombrables sont tes oeuvres !

Elles sont cachées à notre vue.

Ô toi, l'unique Dieu qu'aucun n'égale,

Toi qui créas la Terre selon ton désir

Alors que tu étais seul :

Les hommes, les animaux petits et grands,

Tout ce qui existe sur la Terre et marche de ses pieds

Tout ce qui est au-dessus et vole de ses ailes.

Tu as créé un ciel lointain pour t'y lever

Et contempler tout ce que tu as créé,

Toi, tout seul :

Le monde est en tes mains

Tel que tu l'as fait.

Ton fils, issu de ta substance,

Est le roi qui vit dans la vérité,

Akhénaton : puisse sa vie être longue !

Et de sa grande épouse royale, sa bien-aimée,

Reine des deux terres, Néfertiti,

Puissent la vie et le bonheur être éternels !

Pyramide gif

Un règne bref, qui mena l'Égypte à la ruine 

Ce véritable mystique, premier en date dans l'Histoire, ce roi qui dictait ou inspirait une poésie religieuse d'une telle élévation devait rester étranger au monde politique et social de son temps. Malheureusement pour lui, ce monde était dominé par des évènements qui, de plus en plus, menaçaient la puissance du souverain, complètement absorbé par ses préoccupations spirituelles. Les frontières du nord de l'empire se trouvaient exposées à l'invasion. Les princes vassaux de l'Égypte en Syrie demandaient instamment au roi l'envoi d'une armée pour les défendre. Ces lettres, retrouvées à Tell el-Amarna, se répétèrent avec beaucoup d'insistance, mais toujours en vain : le roi ne répondait pas. Akhénaton, croyant en l'amour universel de Dieu, proclamait la fraternité universelle, et refusait de faire la guerre. Celui qui se disait "vivant dans la vérité" se serait bien gardé de commettre un acte contraire à sa doctrine.

Lorsque les Égyptiens comprirent que l'attitude de leur roi menait l'empire à la ruine, des troubles éclatèrent; et le parti des prêtres d'Amon, hostile à la nouvelle religion, puisa une force accrue dans le mécontentement général.

Les difficultés rencontrées par le roi pour répandre sa doctrine et maintenir l'intégrité de l'empire eurent-elles un effet fatal sur sa santé ou, au contraire, la faiblesse de celle-ci l'empêcha-t-elle de prendre les résolutions nécessaires et de vivre plus longuement ? Il est impossible de le préciser. Toujours est-il qu'il ne lui fut donné de passer qu'une dizaine d'années dans sa merveilleuse ville de l'Horizon. Dix années de bonheur, il est vrai, pour le grand idéaliste, exclusivement partagé entre l'amour de sa famille et de son Dieu.

En 1358 avant notre ère, dans sa trentième année, Akhénaton mourut. On l'ensevelit dans la tombe qu'il s'était depuis longtemps préparée, près de sa ville bien-aimée; après quoi, la ville elle-même fut abandonnée de tous. La cour retourna à Thèbes; et les prêtres d'Amon triomphants firent le nécessaire pour que disparût rapidement tout vestige de la religion d'Aton. Celle-ci étant d'ailleurs trop élevée pour le peuple, elle ne s'était pas largement répandue. La dépouille mortelle d'Akhénaton fut privée des honneurs royaux. On la transporta dans le tombeau de la reine Teiyi, décédée quelques années auparavant, et l'on fit disparaître de tous les attributs de sa momie le nom honni de l'hérétique.

Trente-trois siècles plus tard, le privilège devait nous échoir de reconnaître et d'apprécier à sa juste valeur l'oeuvre magnifique et éphémère de ce grand précurseur.

William Mackenzie, Les grandes aventures spirituelles (Éditions Planète, 1967)

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