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Les voies de l'étrange et du mystérieux
Les voies de l'étrange et du mystérieux
  • Ce site se propose de rapporter des histoires mystérieuses et peu connues. Car bien souvent, le paranormal est là où on ne l'attend pas. Il évoque aussi certaines énigmes, en les abordant sous un angle inédit.
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Les voies de l'étrange et du mystérieux
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15 avril 2020

Dialogue avec l'au-delà (5)

Cette proposition ne me séduisait guère. Cela sentait la cartomancie et le marc de café. Cependant, faute de mieux, et parce que j’avais confiance en John Pearce Higgins, qui ne serait pas permis de plaisanter dans un moment pareil, Maren et moi tentâmes l’expérience en suivant ses instructions. Assez rapidement, le verre que nous avions posé sur une toile cirée glissa vers la lettre M puis revint au centre du demi-cercle ; il commença plus lentement à se mouvoir avec la lettre F.

 

Après un long moment où rien ne se passa, David prit la place de Maren. Le verre parut bouger à nouveau, et pour me tester moi-même et David, je donnai une petite secousse vers la gauche. Apparemment déséquilibré, le verre reprit son mouvement et continua de se diriger vers la lettre B.

 

Le phénomène était insolite, mais malgré tout, je renonçai. C’était trop long et peu convaincant. Je n’avais nulle envie de passer des heures assis autour d’une table à attendre qu’un verre bouge tout seul. Vraiment, j’avais trop à faire avant de regagner les U.S.A. pour gaspiller mon temps à ce genre d’occupation.

 

Je rappelai Pearce Higgins et lui fis part de l’échec de l’expérience. N’était-il pas préférable de consulter Mrs Twigg ?

-Bien, fit le chanoine avec quelque hésitation. Je tâcherai de vous obtenir un rendez-vous. C’est la meilleure et la plus sensitive que je connaisse. Mais elle est très occupée. Je vous rappellerai.

 

Dans l’après-midi, il m’informa que Mrs Twigg nous recevrait chez elle le surlendemain 2 mars, à 15 h.

 

Dans une ambiance plus détendue, la journée se passa à travailler. Juste avant de nous retirer pour la nuit, nous remarquâmes qu’il n’y avait eu aucune manifestation durant la journée. Je commentai sur un ton léger :

-C’est étrange. Peut-être Jim ne se manifestera-t-il plus désormais. Cela me manque.

 

Les manifestations avaient été inoffensives au cours de ces derniers jours, et nous nous étions accoutumés à sentir en quelque sorte la présence du disparu. Jim me manquait et je n’hésitai pas à dire :

-Tout cela est si nouveau pour moi que j’ai longtemps hésité à consulter un médium. J’espère que notre réponse tardive n’aura pas découragé Jim !

 

Comme pour me donner un démenti, une impressionnante série de manifestations se déroula le lendemain : nous découvrîmes que des livres avaient changé de place ; des fenêtres que nous avions laissées ouvertes s’étaient refermées, des épingles de sûreté traînaient ouvertes en différents endroits, des vêtements avaient été dérangés, etc.

 

Cependant le point culminant de cette journée se déroula en deux phases.

 

Alors que nous examinions dans la chambre de Maren des vêtements qui paraissaient avoir été dérangés à notre insu, nous fûmes témoins pour la seule et unique fois du mouvement spontané d’un objet.

 

Nous avions acheté récemment à Wells, petite ville du sud-est de l’Angleterre bien connue pour son artisanat d’argent fin, une garniture de toilette en 4 pièces, et nous l’avions posée sur une étagère. Soudain, l’une des pièces du service, encore enveloppée dans son emballage, commença à glisser vers le rebord de l’étagère. Pendant que nous regardions, incrédules, l’objet tomba et Maren le rattrapa au vol.

 

En déballant la pièce, nous vîmes qu’il s’agissait du miroir à main, le seul qui se trouvait dans la maison. Nous examinâmes les autres pièces du service et constatâmes qu’elles étaient solidement posées sur l’étagère. Les planches de celle-ci n’étant pas inclinées vers l’extérieur mais plutôt vers le mur. Je me rappelai alors les histoires de démons et de sorcières, auxquels les miroirs servaient souvent de talismans, surtout pour jeter des sorts. Nous étions stupéfaits et cependant certains que c’était encore Jim qui manifestait sa présence.

-Remettons-nous au travail, dis-je.

 

Et nous revînmes au salon.

 

David se rassit à la table où il travaillait avec le journal diocésain et un annuaire, mais celui-ci avait disparu.

 

Pendant que nous nous mettions à sa recherche, Maren se sentit tout à coup poussée, ou conduite, vers mon porte-documents qui était dans ma chambre.

 

Comme elle se dirigeait vers la chambre, David et moi à sa suite, je dis pour les rassurer :

-Je suis sûr que cet annuaire est quelque part dans l’appartement.

 

En fait il se trouvait à l’intérieur de ma serviette en cuir, sur le haut d’une pile de livres, et personne ne s’expliqua comment il était arrivé là.

 

Lorsque j’y réfléchis aujourd’hui, je me dis que nous étions sans doute trop enclins à attribuer à Jim ces divers phénomènes. Pourtant, avec l’habitude, nous n’envisagions aucune autre hypothèse. Nous portions délibérément tous les phénomènes inexplicables sur le compte de mon fils. Nous étions convaincus qu’il était en quelque manière responsable de tout. Ce n’est que bien plus tard, au cours de mes études sur les manifestations psychiques, qu’une autre hypothèse, tout aussi complexe, me vint à l’esprit.

 

Le vendredi, durant la matinée qui précéda notre rendez-vous avec Mrs Twigg, nous fûmes témoins de trois phénomènes étranges. D’abord une mèche de cheveux blonds et bouclés appartenant sans aucun doute possible à Maren fut découverte à l’endroit habituel entre les deux lits. Nous n’avions jamais pu retrouver les boucles brûlées la semaine précédente. De plus, il n’y avait aucune trace de brûlure dans la chevelure de Maren ce matin-là.

 

En second lieu nous remarquâmes, dans la salle de bains, la présence de deux épingles de sûreté ouvertes, et qui formaient entre elles un angle de 140° - correspondant sur un cadran de montre à 8 h 19. Enfin on trouva le livre Armageddon de nouveau près de la table de nuit, légèrement à gauche sous le lit. Entre les pages, la même carte postale de Peterborough était cette fois encore collée avec une substance molle, sur laquelle nous relevâmes avec stupéfaction une empreinte digitale ! Une empreinte de pouce ! Comment cela était-il possible ? Je regardai Maren et David d’un air soupçonneux.

-Comparons cette empreinte aux vôtres… et à la mienne, m’empressai-je d’ajouter, pour voir si elles se ressemblent.

 

Nous n’étions pas des experts mais il nous sembla que l’empreinte mystérieuse était tout à fait différente des nôtres.

 

Plus tard, en y réfléchissant, j’échafaudai deux théories pour expliquer ces manifestations mais sur le moment nous conclûmes que, une fois de plus, seul Jim pouvait en être à l’origine.

 

Ouija

 

La maison où nous arrivâmes, à East Acton, n’était pas différente des centaines d’autres de cette banlieue londonienne. Mrs Ena Twigg, une femme d’une quarantaine d’années, nous accueillit sur le seuil.

 

Son sourire était engageant et ses manières affables, elle était aimable.

 

David était resté à l’appartement. Seule, Maren nous accompagnait en tant que témoin. « Mieux vaut ne pas être trop nombreux, cela pourrait gêner la perception du médium », avait dit Higgins, qui se chargeait pour sa part de prendre des notes.

 

La chanoine m’avait recommandé de ne rien révéler à Mrs Twigg, ni sur moi, ni sur ma famille, ni surtout au sujet de Jim. Ainsi, tout ce qui serait annoncé serait plus probant. Que notre hôtesse ne sût rien de moi eût été surprenant, et même quelque peu vexant. Elle était elle-même membre de notre Église et durant ces dernières années, j’avais prêché à la cathédrale St-Paul à Londres, à Canterbury, à York et dans différentes paroisses. J’avais participé à un certain nombre d’émissions à la TV britannique. De plus, les journaux anglais et les bulletins religieux avaient rendu compte des charges d’hérésie dont j’étais l’objet. Ma photo paraissait de temps à autre dans la presse, dont une où l’on me voyait en conversation avec le duc d’Edimbourg. En tout cas, elle me connaissait au moins de nom.

 

Nous nous assîmes au salon pour lier connaissance.

-Elle voudra sans doute faire un peu connaissance avec vous, m’avait dit notre chanoine. Pendant qu’elle parle de choses et d’autres, qui n’ont rien à voir avec le but de notre visite, elle reçoit vos vibrations et « sent » votre personnalité. Ensuite nous monterons dans son parloir pour la séance. 

 

Lorsque je sentis que nous avions suffisamment devisé, je demandai à m’absenter un instant. Seul dans le corridor, je me sentis soudain ridicule.

 

Soudain, alors que je mettais la main sur la poignée de la porte pour entrer dans le vestibule, j’eus clairement conscience que Jim était là. À cet instant, je n’aurais pas été surpris le moins du monde s’il s’était avancé à ma rencontre. C’était une vision grandeur nature qui dura une fraction de seconde, au moment où j’ouvrais la porte. Et, se superposant à cette image, une sensation de joie m’envahit : je revis l’instant vécu en Israël où, début janvier, nous nous étions retrouvés, Jim et moi, après mon voyage en Rhodésie : j’avais ouvert la porte, il souriait de la même manière et nous nous étions embrassés très émus.

 

Je revins à la réalité : le vestibule était vide, et je rejoignis les autres au parloir situé sur le devant de la maison. Au moment où je prenais un siège, je gardais cette sensation chaleureuse de la présence de Jim.

-Auriez-vous sur vous quelque chose ayant appartenu à votre fils ? me demanda tranquillement Mrs Twigg en s’asseyant.

 

Je lui tendis le passeport de Jim, celui-là même qu’il avait oublié à Cambridge en quittant l’Angleterre.

 

Nous restâmes tous silencieux.

 

Mrs Twigg commençait de manifester des signes d’agitation.

-Il est là… Il fait des efforts pour se manifester, annonça-t-elle.

 

C’était, pour ainsi dire, comme si elle reprenait la conversation interrompue.

-Votre fils était par nature un garçon turbulent et joyeux, commenta le médium.

 

À partir de cet instant, il sembla que quelqu’un parlait par sa bouche :

« Je n’ai pu surmonter l’épreuve… Je ne peux vous supporter ! Je ne peux supporter la vie ! Je suis en pleine confusion ! Mourant soudainement. Je ne pouvais faire autrement. Impossible de trouver quelqu'un. Dieu ! Je ne savais pas ce que je faisais. Mais maintenant que je suis arrivé ici, je me rends compte que ce n’était pas un échec tel que le croyais. Mon système nerveux a cédé ! »

 

Pendant tout ce temps, je sentais la présence de Jim. En fait, bien que je ne vis rien, j’avais nettement l’impression qu’il se tenait debout un peu en retrait, derrière et à droite de Mrs Twigg. J’écoutais intensément, participant à la souffrance que mon fils apparemment tentait d’exprimer.

 

La voix du médium reprit :

« Je ne suis pas ici au purgatoire mais dans une espèce d’enfer, pourtant personne ne me reproche rien. »

 

Je fus abasourdi par ces mots. Que voulait-il dire ? Puni mais non blâmé ?

 

Alors :

« J’espère que personne ne me blâme parmi vous. »

 

Puis :

« J’ai retrouvé ma grand-mère. »

 

C’est faux, pensai-je – car les deux grands-mères de Jim étaient et sont encore vivantes. Mais je ne dis rien.

 

« Vous aviez beaucoup de soucis à ce moment-là. Cela m’affectait, papa, car on vous attaquait. »

 

Jim m’avait appelé « Papa », ce qui lui ressemblait bien, et en fait nous avions eu tous deux nombre de soucis. Je ne me rendais pas encore compte pour ma part jusqu’à quel point ; je ne le sentis vraiment que deux ans et demi plus tard, lorsque tout fut fini.

 

« Je suis venu à votre porte. J’ai déplacé les livres, j’ai frappé à votre porte, je suis venu à votre chevet. Vous avez rêvé de moi et vous m’avez parlé », continua la voix de Mrs Twigg, parlant, semble-t-il, comme si c’était lui.

 

Même si les détails étaient inexacts, les mots sonnaient juste par rapport à nos expériences des deux dernières semaines. Je n’avais toutefois jamais entendu de coups frappés à ma porte. Mais l’essentiel correspondait aux manifestations observées dans l’appartement.

 

« Je vous aime beaucoup, continua la voix du médium, tant d'amour et aucun moyen de vous le prouver ! »

Comme c’est vrai ! pensai-je.

 

Ena Twigg continua :

« Je ne peux surmonter mes regrets, pourtant les autres ici m’aident à m’en sortir et nous devons progresser tous ensemble. Je dois vivre ma vie et vous la vôtre. »

 

Après une pause, le médium parla pour son compte :

-Il envoie sa tendresse à sa famille – deux filles, un garçon, précisa-t-elle. Il dit quelque chose à propos d’une porte d’or. Il dit que vous avez très bien fait. Cela signifie-t-il quelque chose pour vous ? demanda-t-elle.

-Bien sûr ! répondis-je.

 

Ma pensée revint à ce jour triste et ensoleillé où nous avions jeté les cendres de Jim sur les vagues du Pacifique près du Golden Gate.

 

Jim parut parler à nouveau :

« Il n’y a pas de nuages là où je suis, pas de confusion dans la terre de lumière… »

 

Voilà, pensai-je, une curieuse réflexion par rapport à sa confusion de tout à l’heure.

 

« C’est le chemin de la liberté : revenir et essayer d’expliquer. »

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